Axe 2 : L'objet dans tous ses états


L’originalité de cet axe réside dans son caractère pluridisciplinaire, au croisements des diverses spécialités qui composent le CRATA : archéologie, Histoire de l’Art, lexicologie, étude des imaginaires littéraires. Centré initialement sur l’objet matériel, son élaboration, ses dénominations, ses fonctions, ses valeurs symboliques, il s’est progressivement élargi en direction des monuments et des espaces religieux et politiques.

a)  Fonction et symbolique des objets

On se proposait ici d’examiner en premier lieu la « vie symbolique » des objets matériels à travers notamment les phénomènes de défonctionnalisation et de refonctionnalisation, et en relation avec les pratiques sociales et rituelles. Cette problématique était l’un des axes majeurs du colloque du CRATA « déchéance et réhabilitation dans l’Antiquité gréco-romaine. Espaces, objets, personnes », tenu à Toulouse en avril 2019, et dont les actes ont été publiés en 2024 chez Ausonius Editions (dir. : J.-Chr. Courtil, E. Galbois, S. Rougier-Blanc, F. Ripoll) ; quatre des vingt contributions présentées envisagent les « destins d’objets », à quoi l’on peut en ajouter quatre autres portant sur les monuments abandonnés puis réinvestis.

Relève également de ce sous-axe le projet TERRAEGYPT porté par E. Galbois pour l’étude des collections de terres cuites d’Egypte d’époque gréco-romaine. Le projet a pris la forme de deux ateliers (en 2022 et 2024) centrés respectivement sur les collectionneurs  (notamment L. Bonnat et J.-A. Périchon) et sur les partis pris muséographiques de présentation des figurines (collections du Louvre, du musée égyptien de Turin, les musées de Beaux-Arts de Lyon et de Limoges). Un dossier de la revue toulousaine Anabases synthétisant les acquis des deux ateliers est en préparation pour 2025. A cela s’ajoutent deux autres workshops sur la conservation et la restauration des terres cuites (octobre 2021) et sur les céramiques et terres cuites de Soknopaiou Nesos (novembre 2022) ainsi qu’une JE « terres cuites et sociétés antiques » (avril 2023) également organisés par E. Galbois.

En outre, la Journée d’Etudes pluridisciplinaire du CRATA « La loi des séries » organisée par F. Ripoll en octobre 2022 incluait, au côté de communications relevant de la linguistique et de la littérature grecque et latine, des exposés sur les productions en série de terres cuites d’Egypte gréco-romaine (E. Galbois) et sur les images sérielles des sceaux, intailles et verres moulés (L. Sageaux) ; les actes ont été publiés dans le n° 124 de Pallas en 2024.

Enfin, les recherches menées par J.-M. Luce sur les offrandes sur le site de Delphes sont à l’origine des réflexions sur la délimitation de l’espace sacré mentionnées plus loin (axe 2.C).

 

b) Instrumenta. Le métal et le bois : technique et symbolique


L’analyse des outils au sens large (les noms et le vocabulaire, les matériaux, les usages) est liée à deux projets d’étude des techniques, dans lesquels plusieurs membres de l’équipe sont impliqués :
 
  • Le projet METALLA portant sur le métal dans l’Antiquité, est au croisement des axes 1 (« les textes et la langue ») et 2 du CRATA. Il vise à constituer un lexique général des mots du métal en latin, mais aborde aussi les procédés d’extraction minière, la transformation et les usages des métaux. Ce projet interdisciplinaire repose sur une collaboration entre philologues, historiens et archéologues et sur un partenariat entre les équipes TRACES (à laquelle appartient le porteur du projet J.-M. Pailler) et CRATA, représenté par E. Dieu, P. François et V. Gitton-Ripoll. Le volume I. 1 (un lexique des mots latins du métal de près de 330 entrées, co-dirigé par J.-M. Pailler, P. François, V. Gitton-Ripoll et M.-P. Coustures, est actuellement sous presse, pour une parution prévue aux PUM fin 2024-début 2025. Le volume I. 2 comportant des études sur auteurs paraîtra en 2025, et un volume grec est en préparation, auquel est associé E. Dieu.
  • Le second projet relève du groupe de travail sur « les mots du bois en grec du linéaire B au grec byzantin » et a été coordonné notamment par S. Rougier-Blanc et S. Lamouille jusqu’à leur départ du CRATA en 2021 ; E. Dieu reste impliqué dans le projet, visant à la constitution d’un lexique des mots du bois. Ce projet a donné lieu à une Journée d’Etudes à Toulouse en octobre 2021 et à une demi-journée d’études en 2022 à Aix-en-Provence. Relève également de cet axe l’école thématique CNRS PLURIBOIS du GDR « Sciences du bois » sur les bois et leurs usages, co-organisée par S. Rougier-Blanc en partenariat avec TRACES et GEODE qui a débouché sur un atelier de recherches pluridisciplinaire à Aspet en juin 2022. Un projet ANR PRC, TiMMA (« Timber in Minoan and Mycenian Architecture ») a été déposé en 2020 par S. Rougier-Blanc et retenu en 2021 avec changement de laboratoire de tutelle, la porteuse du projet ayant été recrutée à l’UPEC.
 

c) Objets et lieux de mémoire


L’idée de ce sous-axe a émergé dans le cadre du séminaire commun CRATA-ERASME 2017 coordonné par F. Ripoll et A.-H. Klinger Dollé « La fabrication de l’Antiquité par les Anciens », dont les actes, parus en 2021 dans Pallas 116 comportaient deux contributions sur six centrées sur la réinterprétation de la valeur symbolique des objets anciens dans l’Antiquité. De là a procédé un nouveau cycle du séminaire commun sur « Objets et lieux sacrés : réalités et imaginaires » en 2020, prorogé en 2021, et dont certaines contributions ont été publiées dans le dossier thématique du même nom coordonné par F. Ripoll dans Pallas 118 en 2022. Cette réflexion envisageait des objets et lieux sacrés au sens large du terme, c’est-à-dire soit directement liés au culte, soit investis d’un sentiment de piété respectueuse et porteurs de valeurs affectives et symboliques pour une société antique donnée. Sur les cinq contributions retenues pour publication, deux abordent effectivement des objets (les instruments de musique cultuels à percussion et le buste de Tanit d’Ibiza), et les autres des monuments ou des espaces sacrés. La question de la symbolique des lieux et des espaces a donc émergé progressivement à côté de celle des objets stricto sensu, et a alimenté d’autres travaux de l’équipe.

J.-M. Luce a poursuivi ses recherches sur la délimitation de l’espace sacré de Delphes qui ont enrichi notamment le dossier « Objets et lieux sacrés ». R. Courtray a co-organisé en juin 2024 une Journée d’Etudes sur « lieux bibliques, lieux sacrés chez Jérôme (en partenariat avec l’université allemande de Bochum). Parallèlement, des doctorants en CDU du CRATA, I. Maréchal et F. Racine, ont organisé en partenariat avec ERASME, en avril 2024, un Colloque Jeunes Chercheurs sur « L’espace politique dans l’Antiquité » qui s’intéressait notamment aux réalités et à l’imaginaire des lieux de Pouvoir. Enfin, l’arrivée en 2022 de C. Weber-Pallez, spécialiste de la question du territoire dans le monde grec, a renforcé ce « tournant spatial » du CRATA, avec la co-organisation de deux journées d’Etudes à Toulouse et Mulhouse en juin 2023 et 2024 dans le cadre du projet TeMAES (« Territoires multiples : agentivité et environnements socio-économiques »), dont elle est co-fondatrice. La même C. Weber-Pallez a proposé avec succès pour le Labex SMS 2024 le projet pluridisciplinaire Mont-EVRA (« montagnes du passé, montagnes du présent : Espaces Vécus, Rêvés, Appropriés »), axé sur l’étude des réalités et représentations de la montagne de l’Antiquité à nos jours, avec l’organisation de rencontres internationales en 2025.

La question du territoire, associée aux problématiques de construction des espaces du religieux et du politique, a finalement débouché sur ce qui sera le futur axe 3 de l’équipe ARTEMIS : « construire les communautés ».