Axe 2 : L'objet dans tous ses états



Ce nouvel axe transversal et pluridisciplinaire, à la croisée des axes « Représentations » et « Patrimoine et société » du quinquennal précédent, va concerner l’objet matériel : identification, fonction dans les sources littéraires, iconographiques et archéologiques.

a)  Fonction et symbolique des objets


Un objet se définit par sa fonctionnalité. Mais la fonction de l’objet se transforme souvent au fil du temps, à l’occasion des réemplois et des métaphorisations symboliques, ou elle se renégocie, parfois se perd, comme dans le processus de consécration des offrandes. Les différents usages sont créateurs de nouveaux sens et de nouvelles représentations. L’objet usuel devient objet d’art, signe monétaire, ou même pacotille, en se chargeant d’une nouvelle valeur symbolique ou en perdant toute valeur. Il s’agit donc de mettre en lumière l’évolution dans le temps de cette symbolique de l’objet.
La fonctionnalité peut également connaître de nombreux changements dans l’univers des textes littéraires, où son efficacité ne repose pas ou plus sur les mêmes bases que dans la vie réelle. L’équipe souhaite étudier ces écarts, ces modifications de l’usage et de la signification qui constituent la « vie symbolique » des objets. Elle prévoit d’insister plus particulièrement sur les processus de défonctionnalisation, aussi bien dans les discours que dans les pratiques sociales et rituelles, notamment à travers l’analyse du devenir des offrandes initiée par J.-M. Luce dans ses travaux sur le site de Delphes et sur l'analyse comparative des données de Delphes et d'Olympie (partenariat DAI, EFA et RGZM)

b) Instrumenta. Le métal et le bois : technique et symbolique


L’analyse des outils au sens large (les noms et le vocabulaire, les matériaux, les usages) est liée à deux projets d’étude des techniques, dans lesquels plusieurs membres de l’équipe sont impliqués :
  • Le premier projet porte sur la métallurgie dans les mondes anciens, les mots et les textes : c’est le projet METALLA, en collaboration avec le laboratoire TRACES, auquel participent P. François et É. Dieu, membres du CRATA, et V. Gitton-Ripoll, membre associée. Ce projet a pour objectif d’établir le pont qui fait actuellement défaut entre linguistique et archéologie. Il s’agit aussi de constituer un recueil de documents anciens sur les mines et le métal : textes, traduction nouvelle, commentaires techniques, archéologiques et historiques, illustrations. Le CRATA a toute sa place dans ce projet commun grâce aux compétences philologiques et linguistiques de ses membres.


  • Le second projet, qui relève aussi de l’axe 3.A (Bois et construction), porte sur les mots du bois (pièces de charpente assurant la stabilité, outils de travail du bois, etc.), dans l’optique d’une meilleure compréhension des assemblages bois et des diverses techniques utilisées. Combinant, comme pour les métaux, l’étude des textes épigraphiques et des sources littéraires ou iconographiques, l’approche des mots du bois va permettre d’analyser les tenants et les aboutissants du processus de construction sous un angle pragmatique, mais aussi, là encore, symbolique, parce que les mots sont révélateurs de représentations du matériau et de l’élément architectural considéré. Une série d’ateliers recherche collaboratifs est prévue. La première journée, programmée en octobre 2021 (org. V. Mathé, St. Lamouille, S. Rougier-Blanc) jettera les bases d’un travail de publication d’un lexique des mots du bois du linéaire B au grec byzantin.

c) Objets et lieux de mémoire


Déjà abordé ponctuellement au cours du séminaire commun CRATA-ERASME du précédent quinquennal, ce thème va être réinvesti pour replacer l’étude de l’objet dans le temps long. Le Séminaire commun de 2019-20 portera sur le sujet suivant : « Objets et lieux sacrés : réalités et imaginaire » (resp. F. Ripoll). Il s’agira d’étudier la façon dont des objets, des édifices ou des lieux, réels ou fictifs, peuvent être investis de valeurs susceptibles de leur conférer une signification d’ordre affectif et symbolique pour une collectivité donnée.
La notion de « sacré » est à entendre au sens large du terme, c’est-à-dire englobant les objets et lieux de culte proprement religieux, mais aussi, plus généralement, tous les supports concrets auxquels peuvent se rattacher des sentiments de piété respectueuse, ou a contrario, d’ « horreur sacrée » (les « lieux maudits », par exemple).
On inclura donc dans cette approche les monuments commémoratifs, trophées, statuaire, sépultures, les champs de bataille, et tout autre élément matériel ou spatial servant de base à une démarche de valorisation et de « sacralisation » axiologique ou mémorielle et contribuant à façonner l’identité d’une communauté. Les objets d’étude pourront être issus aussi bien du champ d’investigation de l’archéologie que de celui de la littérature, et être envisagés à travers l’imaginaire antique, aussi bien proche-oriental que gréco-romain.